dimanche, septembre 17, 2006

Fenêtre[s] 10


















Fenêtre, 2005
Acrylique sur papier
30 x 40 cm

Cette Fenêtre a été réalisée dans les ateliers de l'association de Nicolas Daquin "Le Camion", à Roubaix, en décembre.

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dimanche, septembre 03, 2006

Blanc...

Voilà. Il y a des vieilles pierres qui n'en peuvent plus de porter le poids des ans. Alors elles s'écroulent. Comme à Blanc.

Perdues dans leur solitude près du ciel et des nuages elles tombent sur le sol une à une emportant chacune un petit morceau d'histoire, une phrase, un mot, un peu de vie.

C'est ainsi que dans les campagnes, les villages, les hameaux, les histoires se perdent et la vie s'enfuit.
Parce que les pierres un jour sont fatiguées de porter le poids des années, fatiguées de parler pour personne et pour rien, au vent qui n'entend pas, au ciel qui se tait…, fatiguées.

Alors, livrées au soleil et à la pluie, elles s'écroulent et forment un tas puis deux puis trois, un tas de pierres, un tas de misère.
Elle tombent comme un oiseau foudroyé dans son vol et meurent peu à peu, doucement, attendant que quelqu'un vienne les ramasser, pour finalement, résignées, se rendre et se laisser faire.

Arrive alors le temps de l’oubli qui recouvre et qui efface tout.

Les jours sombres et les nuits blanches.

Tout s’éloigne dans le temps.

Le silence s’installe et règne en maître des lieux.

Rien ne reste dans la mémoire des hommes.



Pour aller à Blanc il faut prendre la route départementale 149 et au bout de quelques kilomètres, six pour être juste, on y arrive. On peut y aller en voiture bien sûr mais Blanc se mérite à pied comme "au temps des institutrices où Blanc refuse l’auto".

C’est comme çà qu’un jour, par hasard peut-être ou peut-être pas, un homme vient. A pied…

Il voit les pierres. Il pose un genou à terre puis l'autre et la tête dans les mains, il pleure.
Et la pluie le rejoint et va gonfler le Dourdou. Faire rouler les cailloux jusqu’au bout de nulle part.
Sa tristesse achevée l’homme se relève, dresse sa silhouette bien droite dans le ciel comme pour toucher les nuages.
Il remonte ses manches de chemise, crache dans ses mains et les frottent comme font tous ceux qui ont faim des pierres.
Commence alors le long travail d’amour où ne compte ni l’heure ni le temps passé…

Parfois il y a des gens qui parlent et qui racontent Blanc. Des petits détails de la vie de tous les jours. C’est comme un peu de chaleur qui fait des trous dans la neige.
On se met à rêver à cette vie dure mais si vraie que l’on devine à travers les mots, dans un silence, un soupir, dans un regard.

Un jour certainement une cloche fera entendre le son de sa voix. Les troupeaux d’hommes guidés par ce même chant d’amour s’en retourneront, d’un pas sûr et lent, sur le chemin des écoliers, parsemé de cailloux et de belles fleurs fragiles, vers cet endroit magique où l’on entend renaître comme un nouveau printemps le bruit simple et tranquille de la vie…
Juillet 2003-juillet 2004